LA FIRIP SE BRANCHE SUR LES OBJETS CONNECTES


Les réseaux d’initiative publique ont-ils un rôle à jouer dans l’Internet des Objets

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Réunis à Angers pour ses 3 ans d’existence dans la très symbolique et toute nouvelle Cité des Objets Connectés, la Fédération des Industriels des Réseaux d’Initiative Publique (FIRIP) lançait le débat sur l’enjeu que peut représenter l’Internet des objets pour des réseaux publics fixes à très haut débit. Etienne Dugas, le Président avait réunis quelques uns des éléments clés de cette Fédération qui regroupe maintenant 160 membres et représente les intérêts des industriels. Au-delà de l’habituel aéropage d’élus et responsables locaux vantant plutôt bien les mérites et l’appétence technologique de leur seul territoire, quelques invités de marque étaient présents pour discuter des réseaux face à l’Internet des objets. On notera cependant qu’aucun grand opérateur national n’était présent, alors que les RIP, financés par des fonds publics, représentent en général un complément de leurs réseaux existants. Mais certains opérateurs, dont l’ancien opérateur historique, les voient comme des concurrents… !

La fibre est indispensable…et là pour s’étendre et durer

Quel idée de parler de haut débit dans l’Internet des Objets ?  Chacun sait que celui-ci récolte un petit nombre de données pour chaque objet, celles-ci s’acheminent régulièrement dans des serveurs où elles sont stockées puis ensuite traitées, parfois en temps réel. Patrick Chaize, nouveau Président de l’Avicca et Sénateur de l’Ain est très clair : « La fibre est nécessaire parce qu’il y aura des milliards d’objets connectés et il faut des réseaux d’infrastructure capables de supporter la collecte du trafic généré par tous ces objets vers les points de centralisation des données. Les usages ne sont pas encore là certes, poursuit-il, mais il y a 15 ans, on nous regardait avec étonnement lorsqu’on parlait de très haut débit, les usages sont arrivés plus vite qu’on ne le pensait. » Il n’hésite plus à parler ouvertement de boucle locale fibre…et d’abandon rapide du cuivre ! France Télécom doit se retourner dans sa tombe… Il est sur ce point en phase parfaite avec la FIRP.

Antoine Darodes, Directeur de la nouvelle Agence du Numérique mentionnait sa confiance dans l’issue positive des démêlées avec l’Europe du Plan Hollande pour le Très Haut Débit à propos de la subvention de 3 milliards d’euros aux opérateurs pour les zones de moyenne densité en dehors des grandes villes, toujours à la traîne. L’Agence du Numérique qui siège à Bercy, regroupe la French Tech, le nouveau plan Très Haut Débit et l’ancienne Direction des Usages Internet. « L’Agence du Numérique n’est pas un organisme qui fait, dit-il, mais qui anime de façon décentralisée les acteurs publics et privés pour faire avancer le plan très haut débit… ! » Pour lui, le haut débit, tout comme l’internet des objets sont avant tout une affaire de « participation citoyenne » qui permettra à tous les citoyens de participer à l’économie numérique. Mais il indique que les détails seront précisés dans un plan qui sera finalisé et dévoilé au début 2016… ! La quarantaine de personnes de l’Agence va passer un hiver bien occupé à concevoir et préparer cette animation…

Retours sur Investissements « Républicains » pour la Caisse des Dépots

Plus concrète était l’approche de Laurent Depommier Coton de la Caisse des Dépots qui a investi dans une trentaine de RIP depuis l’avènement de l’article 1425 du code des P&T en 2004 et dont l’action dans les réseaux THD s’est étendue des réseaux de collecte aux réseaux de desserte (fibre jusqu’à l’utilisateur).Il a aussi financé une bonne partie des schémas directeurs numériques qui ont conduits a des DSP. « Nous n’avons pas encore financé de réseau urbain ou régional spécifique pour les objets connectés, mais nous y réfléchissons parce qu’ils ont un rôle à jouer dans les territoires intelligents, plus particulièrement en matière de circulation et de sécurit ou de santé publique. Mais l’approche économique est très différente, car les retours sur investissements pour ce genre de réseaux sont plutôt « républicains » c’est-à-dire à estimer en termes de bénéfices globaux  pour les territoires concernés plutôt que financiers au sens classique. »  Il précisait que la Caisse des Dépôt a déjà inv esti dans des sociétés d’auto-partage, des tiers lieux ou encore qui ont un lien étroit avec l’intelligence du territoire qui facilitent l’optimisation des déplacements. Pour lui, les RIP ont bien évidemment un rôle important à jouer dans l’internet des objets dans la mesure où ils représentent une ressource d’infrastructure mutualisée pour la collecte de données qui améliorent la vie sur le territoire.

FIRIP logo

Opérateurs alternatifs : Business modèles, et implication des utilisateurs…

Très logiquement, Lionel Anselmo de Altitude Infrastructure, fournisseur d’un bon nombre de DSP des RIP, préparait le terrain pour son collègue Cyrille le Floch, opérateur du réseau à bas débit Qovisio en posant la question de la cohabitation qui doit s’établir autour des usages.  « Est-ce que ce sont les usages qui justifient les infrastructures ou l’inverse ? » rappelant ce récurent problème de la poule et de l’œuf qui a largement servi d’argument pour freiner le développement du très haut débit en France. Il affirmait enfin que « les collectivités sont encore en mode apprentissage… » oubliant que l’économie numérique est un mode apprentissage permanent…

Cyrille le Floch passait outre le dilemme en citant le « Dash Button » de Amazon, émanation sous forme d’objet connecté de son « OneClick Button ».  Le Dash Button se colle sur le frigidaire et permet, à partir de son smartphone, de créer et gérer une liste de course de produits de différentes marques que l’on veut avoir dans son frigidaire. Le Dash Button détecte automatiquement les produits qui manquent et vous alerte, il suffit d’appuyer dessus une fois pour déclencher l’achat… sur Amazon bien sûr… Il est facile de comprendre le business modèle de cet objet connecté pour Amazon, mais pour l’opérateur qui achemine l’information, l’équation économique parait un peu faible, à moins de passer un accord (de sous-traitance) avec Amazon…

On découvre ainsi l’épine dorsale qui est aussi l’épine dans le pied du business modèle de l’Internet des Objets. « Il n’est pas possible de demander un abonnement pour un objet connecté, explique Cyrille le Floch, sauf si comme nous l’espérons, il y aura à terme une centaine ou plus d’objets connectés dans une maison. On pourra envisager de faire du ‘pay as you grow’… » Mais il faudra alors probablement trouver un agrégateur pour concentrer toutes les données et les envoyer aux sociétés concernées, aux marques et aux grands distributeurs. Ce modèle est honnit par les opérateurs téléphoniques qui cherchent à augmenter leur ARPU en offrant des services en complément des abonnements, souvent en vain… et voient leur bande passante rémunérer d’autres fournisseurs, à leurs frais. Cyrille le Floch précise que les opérateurs sont arrivés en retard sur les réseaux pour l’Internet des Objets. « Ils sont allés naturellement vers Lora parce que Sigfox et nous ne voulions pas vendre notre technologie aux opérateurs. »  Quant aux relations entre les réseaux fibre et les réseaux bas débit, il faudra attendre encore quelques années que se construise des infrastructures de concentration et de répartition des informations générées par des milliards d’objets connectés.

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